Education et culture au Maghreb,
entre français et arabe
1- Monde précolonial et monde colonial : quelle modernisation ? (avant 1942)
Même si les livres et articles, depuis un bon siècle, abondent sur ce thème de l’éducation au Maghreb, j’ai envie d’éclaircir ce qui s’est passé à ce sujet, parce qu’il est au cœur de la question coloniale : « éduquer » les « indigènes » était à la fois une obligation morale, et un alibi, mais surtout une opération politique beaucoup plus complexe que d’apporter des soins médicaux, pour lesquels le seul choix politique est quantitatf : on y met plus ou moins de moyens, par rapport à des normes nationales ou internationales « souhaitables ». Mais au delà du monde colonial, éduquer est devenu le cœur de la politique post-coloniale de coopération, avec des choix politiques encore, explicites ou non ; de même, ce que les nouveaux Etats ont fait pour éduquer dépend de choix politiques. Pour le Maghreb, un des enjeux fondamentaux concernant cette éducation a été le choix des langues utilisées, et donc valorisées[1]. Autre enjeu fontamental, la formation d’élites modernes (de la part de la puissance colonisatrice, puis de la part des Etats naissants), puis la reproduction de ces élites.
Ainsi sommes-nous devant des continuités sur le long terme, parce que les contraintes dépassent les politiques à court terme. La modernité passe par la solution de problèmes linguistiques, pour transformer une civilisation orale de dialectes berbères ou arabes en une société où l’écrit à usage technique est généralisé. Elle passe aussi par l’avénement, après la maîtrise de la mortalité de masse, d’une fécondité à son tour maîtrisée par des femmes… dès lors qu’elles ont accès à l’écrit par lequel passe leur autonomie. C’est sur le plan politique, bien sûr, que la coupure de la fin de la colonisation est fondamentale : les choix concernaient la formation d’élites locales, pour un « bien public » impérial commandé par la France et largement dicté par les élites coloniales. Ces choix sont devenus nationaux, pour des « biens publics » nationaux, dictés par les oligarchies locales, sans cesse à la recherche de consensus pour incorporer aux trois nations qui forgent des sujets ou des citoyens demandeurs de formations pour l’emploi, de promotion sociale.
Le problème traité (Education et culture au Maghreb, entre français et arabe), vu sur le long terme, concerne des politiques culturelles qui ont oscillé entre deux pôles : une modernisation bon marché, pragmatique, s’adaptant au « terrain », celui des populations nomades ou paysannes, rurales plus généralement : c’est la vision des officiers, des administrateurs locaux, des géographes ou etnologues. En face une modernisation selon les meilleures normes des valeurs universelles de la nation française appliquées par des cadres et des spécialistes : c’est la vision des politiques parisiens ou algérois (souvent en désaccord sur les priorités), mais aussi de bien des enseignants « missionnaires » ou coopérants, pour qui les populations maghrébines ont droit au meilleur. Vision aussi des Etats qui naissent : former des cadres supérieurs légitimes dans un monde qui cesse d’être représenté uniquement, puis principalement, par la puissance coloniale. Cette modernisation « par le haut » s’applique évidemment avant tout aux milieux urbains. Au niveau de l’enseignement de base ces deux visions tirent soit vers la séparation entre deux développements (franco-français pour des couches indigènes urbaines favorisées ou sélectionnées, et pour le reste des populations une éducation minimale), soit vers un seul système de haut niveau. Dans le cadre colonial ce système idéal est une utopie : il est trop coûteux et à terme il détruit les bases du monde colonial lui-même. Dans celui des jeunes indépendances en proie à une croissance démographique très rapide, pour des Etats en manque de cadres, il est là encore utopique.
Des politiques d’éducation et de culture moderne sont nées antérieurement à la colonisation politique, surtout en Tunisie et au Maroc, l’un et l’autre atteints par la modernité du XIXe siècle avant les protectorats. C’est au sein même des systèmes culturels traditionnels que des exigences de modernité sont apparues, d’une certaine façon grâce à une « coopération internationale » avant la lettre, sous forme d’experts étrangers que les souverains maghrébins recherchaient, ou d’écoles étrangères dont ils toléraient l’installation chez eux. Mais partout les premières initiatives publiques suivies pour une éducation moderne sont liées aux besoins des militaires qui mènent les conquêtes. Puis viendra l’urgence liée à la croissance démographique qui multiplie le nombre des enfants à éduquer. Cette urgence est perçue dès les années 1930 en Algérie et en Tunisie, dans les années 1940 seulement au Maroc. C’est dans ce cadre d’urgence que les choix linguistiques de cette éducation moderne sont improvisés. Sans cesse surgissent à nouveau jusqu’aux années 2000 les questions d’une modernisation de la darija (arabe parlé populaire local), questions résolues à l’oral pour la radio, la télé, le film ou le théâtre, mais beaucoup moins pour l’écrit, un peu dans la presse, mais beaucoup moins au sein de l’école. C’est ainsi que le français reste la langue principale du roman maghrébin, et que dans celui-ci la figure de la maîtresse ou du maître d’école francophone est centrale dans l’éveil de l’enfant au Monde, depuis le Monsieur Germain d’Albert Camus.
Ceux qui ont été les acteurs non maghrébins de la « coopération » éducatrice et culturelle, avant ou depuis les indépendances ont été en retour profondément marqués par les civilisations maghrébines qu’ils découvraient à travers leurs élèves et étudiants. Leur œuvre intellectuelle a été tributaire de ce qu’ils découvraient, dans les sociétés qui les entouraient, coloniales ou post-coloniales. C’est vrai aussi bien pour les dynasties d’érudits « coloniaux » (les Marçais, Berque, Basset) que pour les « coopérants » (l’historien Marc Ferro, le sociologue Jean Duvignaud parmi tant d’autres).
J’ai déjà abordé dans ce blog ces questions sous l’angle des langues (darija, français, arabe littéraire, tamazight) http://alger-mexico-tunis.fr/?p=599 , http://alger-mexico-tunis.fr/?p=14 , http://alger-mexico-tunis.fr/?p=372 . Mais aussi sous l’angle de la coopération http://alger-mexico-tunis.fr/?p=565 , http://alger-mexico-tunis.fr/?p=189, http://alger-mexico-tunis.fr/?p=61 comme sous l’angle des politiques éducatives http://alger-mexico-tunis.fr/?p=192 , http://alger-mexico-tunis.fr/?p=113
Le présent texte Education et culture au Maghreb, entre français et arabe, Monde précolonial et monde colonial : quelle modernisation ? (avant 1942) est suivi de deux autres :
Virage de la décolonisation : nouvelles mutations dans l’éducation au Maghreb (1942- 1955/ 62) http://alger-mexico-tunis.fr/?p=978
Indépendances et politiques éducatives au Maghreb http://alger-mexico-tunis.fr/?p=981
Scolarisation primaire, nombre d’élèves « nationaux », nombre d’écoles
Année | Algérie | Algérie | Tunisie | Maroc |
Milliers d’élèves | Ecoles primaires | Milliers d’élèves | Milliers d’élèves | |
1850 | 12 | |||
1864 | 18 | |||
1870 | 36 | |||
1880 | 4 | 16 | ||
1887 | 9 | 75 | ||
1891 | 11 | 124 | ||
1898 | 23 | |||
1907 | 32 | |||
1914 | 48 | 3 | ||
1924 | 54 | |||
1938 | 111 | 62 | 24 | |
1946 | 164 | 100 | ||
1954 | 315 | 150 | 137 | |
1962 | 735 |
Quelques comparaisons
Hors du Maghreb, en Afrique noire particulièrement, le système éducatif colonial français, puis ses suites après 1958, s’est fondé sur le modèle simple de la francophonie sans concurrence de la part de langues locales non écrites, avec une demande locale simple elle aussi : créer des élites à la française. Dès les indépendances, des accords bilatéraux ont été signés entre une France « forte » et des Etats africains « faibles », même si avec l’ancienne Afrique Equatoriale un seul accord groupé a été signé. Pour maintenir les diplômes français (sauf au Togo et au Cameroun où la part de l’anglais est réservée), les adaptations locales de programmes sont minimales.
Pour l’enseignement supérieur, les développements d’institutions locales sont freinés : l’exception est Alger, université « entière » au début du Xxe siècle… qui vers 1960 a quelque 5% d’étudiants algériens. Seule Dakar est dotée d’une université « entière »… en 1957, avec 1000 étudiants dont 600 africains, faisant suite à des cours supérieurs nés entre 1947 et 1950. Ailleurs, ce sont des institutions partielles, non stabilisées. A Hanoï (où les concours mandarinaux ont été abolis en 1915-1919), des créations s’échelonnent dès 1907- 1917, s’étoffent en 1936-43, sans lettres ni droit, pour un public local à 90%. Tunis rassemble des enseignements fondés antérieurement en un Institut créé en 1945, dépendant de l’Université de Paris, avec 120 étudiants locaux sur 600. Abidjan n’a d’embryon universitaire qu’en 1959 (moins de 60 étudiants). Parallèlement, les boursiers d’Afrique noire en France dans le supérieur sont 400 en 1945, 2450 en 1955.
Moins malthusiennes sont les créations d’enseignement technique supérieur, à usage strictement local : formation médicale, école normale d’instituteurs. Celle de Hanoï date de 1904, alors que l’école d’interprètes date de 1884. Le Collège Sadiki (Tunis) date de 1875, avant le protectorat grançais, Moulay Idriss à Fès nait en 1914. En Nouvelle Calédonie, les cadres sont formés presque exclusivement par les religieux catholiques.
Le dynamisme des organismes de recherche contraste avec la timidité du versant enseignement supérieur. Si le développement de ce dernier met en cause le monopole de la métropole et subit les incertitudes des politiques de formation d’élites locales qui risquent de devenir nationales, les besoin de connaître les territoires et les sociétés colonisées sont patents, comme la nécessité de protéger colonisateurs et colonisés des maladies mal connues en métropole. Avec des antécédents dès 1875, l’Ecole française d’Extrême Orient date de 1900, l’Institut des Hautes Etudes marocaines de 1920, l’Institut Français de Damas de 1922-28, l’Institut Français d’Afrique noire à Dakar de 1936. Pour la médecine tropicale ou méditerranéenne, les Instituts Pasteur sont multipliés : Saïgon 1891, Tunis 1893, Alger 1909, Tanger 1910, Casablanca 1929 (parmi beaucoup d’autres).
En comparaison, la politique coloniale anglaise a « décentralisé » des universités, dédiées à la formation des élites locales, bien plus précocement : Harvard (Nouvelle Angleterre) en 1636, Freetown (Sierra Leone) en 1827, Cap Town (Afrique du Sud) en 1829… et surtout les systèmes créés dans l’Empire des Indes : il y a 130 000 étudiants indiens/ pakistanais dans le pays en 1939.
Algérie, quelle école en arabe ?
Si l’école « à la française », plus ou moins adaptée, est la base des politiques scolaires coloniales en Algérie comme dans les autres colonies (mais pas aussi simplement on va le voir dans les deux protectorats, Tunisie et Maroc), la persistance (puis la modernisation en 1931) d’une scolarisation coranique en arabe pour l’Algérie est parfois oubliée par les historiens. Elle est une des racines du nationalisme algérien.
Les structures anciennes d’enseignement coranique traditionnel dans les sociétés du Maghreb ou du Moyen Orient étaient destinées à former une toute petite élite de docteurs de la foi et le groupe moins restreint des juristes. Pour le reste, les maîtres d’école (taleb, fqih) apprenaient chacun à un petit nombre d’enfants à réciter des versets du Coran, mais aussi à déchiffrer et écrire les phrases correspondantes. Les maîtres d’école qui enseignaient aussi de la grammaire et du calcul étaient une minorité, bien des familles trouvant suffisants ces rudiments de piété. Ceux qui avaient besoin professionnellement de l’écrit étaient une minorité très restreinte : quelques commerçants en milieu rural et une couche urbaine plus large (mais les villes représentaient moins du dixième des sociétés maghrébine) : là encore artisans ou commerçants et comme on l’a dit gens de loi. Ces écoles coraniques ont été largement détruite par la conquète : de nombreuses zaouias disparaissent, les biens habous possédès par celles-ci et qui constituaient leurs revenus sont séquestrés, des mosquées sont détruites ou leurs locaux réemployés. En 1851, il y aurait au niveau primaire quelque 13000 élèves dans 1000 écoles coraniques, au secondaires, 8000 élèves dans 500 écoles : en moyennes des écoles très petites… souvent un seul maître avec ses élèves assis sur le sol d’un local sommaire, le maître avec sa longue baguette, les élèves avec leur tablette d’écriture en bois. En 1878 au total 2000 tolba enseignent à 28000 élèves. En 1932, 2600 tolba enseignent à 36000 élèves, en 1950, 6200 maîtres pour 103 000 élèves. En majorité ce sont des élèves à temps partiel qui en même temps vont (surtout en ville) à l’école française. Comme au Maroc et à la différence de la Tunisie (dès 1907), pas de débats jusqu’en 1931 sur les contenus scolaires.
Démarrent alors en Algérie les medersas réformées organisées par les Oulemas, exclusivement en arabe à la différence des koutab réformés tunisiens, bilingues. Elles incorporent 30 000 élèves (9% des élèves d’arabe « coranique ») dans 70 écoles en 1935, puis 45 000 (soit 45%) dans 180 écoles (dont 58 de niveau secondaire) en 1954. Le caractère « modernisé » de cet enseignement est très variable, les Oulemas « labélisant » des écoles de contenu très différent. Des enseignants proviennent souvent de la Zitouna (Tunis), des manuels sont importés de Tunis ou du Moyen Orient. En 1947 est créé à Constantine un Institut d’enseignement supérieur, reconnu par la Zitouna, où sont corrigées les copies d’examens : 700 étudiants revendiqués en 1954.
En 1956, la revue Temps modernes publie un cri d’alarme sur la scolarisation en Algérie, de Michèle et Claude Duchet. Leur propos est de montrer la coupure entre l’enseignement « français » et l’enseignemet « arabe ». Ce dernier aurait incorporé en 1830 « tous les garçons de 6 à 10 ans », mais les auteurs disent qu’en 1956 à l’école coranique, qui accueille 100 000 enfants, ceux-ci « chantent sans comprendre » : c’est une façon racourcie de décrire ce qu’était l’enseignement traditionnel ; à l’inverse les Oulemas ont incorporé 45 000 enfants au primaire dans leurs medersas modernes, dont les instituteurs viennent en général de la Zitouna de Tunis. Dans l’enseignement « français » il y a au mieux dans le primaire 2 ou 3 heures d’arabes, ce pour quoi on manque de maîtres formés et sans aucune épreuve d’arabe au certificat d’études primaires. Dans le secondaire (où pour 2/3 l’anglais est la langue vivante) moins du tiers des élèves font de l’arabe, langue réputée destinée aux cancres, avec le paradoxe d’examinateurs d’arabe fort rigoureux au brevet comme au bac. Les auteurs, citant Louis Massignon, appellent à l’intégration dans le système français d’un arabe littéraire modernisé.
Les Oulemas ont comme toute les élites algériennes hésité entre négociations et rupture avec le pouvoir français. Ils se ralient au FLN en 1956, d’où l’incarcération en camps d’hébergement de beaucoup de leurs enseignants. Ceux-ci prennent en main en 1962 l’arabisation et l’islamisation de l’enseignement, alors que ce qui reste des zaouias et confréries est marginalisé par le FLN pour « collaboration », avant d’être décimé dans les années 1990 par les islamistes, hostiles à cet islam traditionnel, puis à nouveau légitimé pour faire contre poids à ceux-ci après 2000. Les zaouias restent détentrices de trésors de manuscrits arabes ou berbères.
L’école française en Algérie, tatonnements et mise en place, avant 1908
Selon Yvonne Turin, jusqu’en 1880 les embryons d’écoles franco-arabes relèvent d’un bricolage, les instituteurs sont souvents des caporaux ou des sous-officiers. Plus qu’une politique de formation de futurs cadres administratifs modernes, des initiatives locales pour mettre fin au vagabondage d’enfants pauvres, parfois en internat payé par la charité ; parfois on paye les familles pour qu’elles y envoient leur enfant. Cependant « théoriquement » il existe un modèle : un taleb à côté de l’instituteur français dans chaque école « franco-arabe », mais des programmes français (inadaptés), et très peu de filles fréquentent les quelques écoles ouvertes. La première « école maure-française » nait en 1836. Dès 1850 dans les départements d’Alger et Constantine on a cinq nouvelles écoles « musulmanes françaises », puis en 1860- 64 des créations pour le département d’Oran. Parmi ces écoles, quelques unes sont destinées aux enfants juifs (encore largement arabophones). Décadence de ces embryons en 1870, si bien qu’en 1882 il ne reste plus que 13 écoles franco-arabes, car 20 écoles disparaissent dans la tourmente de la guerre et des révoltes de 1870- 73. Parallèlement les communes commencent à fonder des écoles primaires pour les enfants d’européens immigrés, qui accueillent accessoirement des indigènes : ceux-ci sont 2000 en 1880 dans ces écoles, alors que dans les écoles franco-arabes ils sont descendus de 13000 (1870) à 3000 (1880).
Commençons par la formation des élites, y compris les futurs maîtres du primaire. Le premier collège secondaire créé à Alger (1857), le second à Constantine (1867) comportent des enseignement d’arabe et de religion. Les élèves qui en sortent sont orientés ensuite vers l’école normale de Versailles, les écoles militaires de St Cyr ou Saumur, l’école d’agriculture de Grignon (sans doute très peu d’élèves indigènes parmis ces jeunes envoyés en France).
Par ailleurs une Ecole normale est ouverte à Alger en 1865, recrutant chaque année 20 élèves français et 10 indigènes. Elle est situé à l’emplacement du Parc de Galland et transférée à la Bouzareah en 1888. Une autre naît à Constantine en 1878, sans doute avec les mêmes recrutements que celle d’Alger. Hors des cours « normaux » on y forme des instituteurs indigènes, plus des adjoints et moniteurs indigènes pour les écoles primaires qui accueillent plus de 25 élèves non francophones. A l’école normale de la Bouzaréah, en 1891, une section spéciale d’élèves-maîtres (une cinquantaine) apprend l’arabe ou le berbère, les mœurs locales et l’hygiène ; ce sont surtout des métropolitains attirés par l’exotisme. En 1896, on recrute pour les écoles indigènes 208 instituteurs français, 40 adjoints indigènes et 60 moniteurs indigènes. Au début on manque de candidats locaux et on recrute dans les écoles normales de métropole. En 1883 on établit un cours préparatoire pour recruter des élèves-maîtres indigènes, qui seront 800 à passer par cette filière jusqu’en 1924, date de la suppression de celle-ci, devenue inutile. Les élèves-maîtres indigènes (jusqu’à quelle date ?) ont droit à un voyage organisé en France de trois semaines. . C’est en 1923 qu’est fondée une Association des instituteurs indigènes. Sur le long terme, de 1866 à 1945 les écoles normales en Algérie forment quelque 5000 instituteurs. Entre 1900 et 1939, sur les 400 à 500 entrants chaque année en école normale en Algérie, 50 à 80 sont indigènes. En 1900, 6% des instits en poste sont indigènes, en1960 la proportion est passée à 10%. En 1955 on a 6 écoles normales (plus deux en construction) qui accueillent 1100 futurs maîtres et maîtresses (sans doute en majorité non-indigènes), couvrant la moitié des besoins (donc l’autre moitié des maîtres vient de métropole).
C’est à partir de cette formation d’instituteurs que peut démarrer une politique scolaire indigène parallèle à la politique scolaire « générale » française (1882). Dans sa Nouvelle géographie universelle (Volume XI, 1886), Elisée Reclus a une vision modernisatrice de la société coloniale algérienne naissante, où la propagation de l’école française va de soi, nécessitant des aménagements dans ses contenus d’histoire et de géographie. Il note que la demande n’est vive, pour les enfants des deux sexes, qu’en pays berbère et dans les oasis sahariennes.
La première instruction officielle parle de classes bilingues, prônées par Ferdinand Buisson. En fait on crée parallèlement trois types d’ « écoles spéciales », toutes pour garçons : écoles principales urbaines, écoles préparatoires de douar, écoles enfantines (3 à 8 ans) ; de plus des indigènes sont accueillis dans les écoles primaires « générales » liées aux communes créées pour la population de nouveaux colonisateurs, dont les familles parlent plus souvent occitan ou alsacien que français, ou maltais, ou sicilien (plus que toscan), ou catalano-levantin (plutôt que castillan). Dans ces écoles, l’on crée éventuellement une « classe d’initiation » pour les non- francophones musulmans (s’ils sont plus de 25).
Parallèlement on crée des programmes adaptés à ce public indigène (leçon de choses, histégéo) et des manuels rédigés par des instits arabes ou kabyles. En 1880 l’enseignement « moderne » pour indigènes commence avec 8 écoles en Kabylie. Vers 1887, les élèves kabyles sont 4/10 pour 6/10 arabes ; à cette date 75 écoles totalisent 129 classes « indigènes », plus 29 classes « préparatoires » en annexes d’écoles primaires non indigènes. En 1891 on compte 11000 élèves indigènes (sur des classes d’âge scolarisables évaluées à 90 000). La première école primaire de filles est créée près de Fort National, couture et français pour des pauvres très jeunes (avant l’âge «d’enfermement »).
Vers 1891, le contenu de l’enseignement indigène se précise : du français de base, plus de l’artisanat ou de l’agriculture, enseigné soit par des célibataires « missionnaires », soit des couples d’enseignants, seuls « pionniers en pays indigène », avec de bons résultats en Kabylie comme à Biskra. Le Plan Jeanmaire veut concentrer l’effort sur quelques territoires favorables où on créera une « masse critique » de scolarisés jusqu’à la scolarisation totale (Kabylie en tête).
En 1892, un décret réaffirme que dans les écoles « françaises », religieusement neutres, tout enfant indigène peut être accueilli. Des écoles de filles indigènes peuvent être créées à la demande des autorités locales (faisant en même temps ouvroir en mi-temps de la journée). En 1899, un certificat d’études « musulman » est créé, auquel sont reçus cette année 166 candidats, pour 50 autres musulmans reçus au certif « normal ». La scolarisation primaire indigène incorpore alors moins de 7% des classes d’âge masculines concernées, soit l’équivalent du croît démographique de ces classes d’âge. Le rectorat d’Alger dénonce la proportion de maîtres « au rabais » et le risque de scolarisation « minimale ». En 1908, un plan établit d’ouvrir annuellement 22 écoles indigènes et 60 écoles « auxiliaires ».
En 1907, 2500 filles sont scolarisée en école indigène (la demande est notable à Bône en particulier), seules possibles alors que les écoles communales « générales » peuvent accueillir des garçons indigènes.
Quelle est la part de l’arabe dans ces embryons de scolarisation ? Rien, sauf l’arabe classique enseigné dans les 3 medersa destinées à la formation juridique des cadis, sous contrôle de l’Académie d’Alger.
1908- 1945 : croissance scolaire algérienne toujours rattrapée par la croissance démographique
Le rythme de croissance annuelle de 1908 à 1914 est de 2300 élèves, soit 52 classes et 60 moniteurs (médiocres). Légère diminution 1914-1922 (des instituteurs nombreux sont mobilisés). Le début de la vraie scolarisation des filles commence, passant de 3800 scolarisées en 1920 à 8000 en 1930, avec des cours complémentaires d’artisanat (de 250 apprenties en 1914 on passe à 600 en 1923).
1923- 39 : on crée en moyenne 55 classes par an, on cherche à améliorer les niveaux en sciences et français écrit pour se rapprocher du niveau des écoles urbaines communales. Dans les années 1930 le Gouverneur Général Jean Carde développe l’enseignement professionnel indigène. C’est le moment où la bataille des chiffres de scolarisation indigène commence, avec des proclamations (Augustin Bernard) sur le désir d’école des indigènes, y compris pour les filles. En 1938 les cours d’arabe non obligatoires dans le primaire, donnés par des moudares, concernent 550 élèves sur les 102000 indigènes scolarisés. A ce moment les bons élèves des écoles primaires indigènes, après 4 ans, font un CM2 à l’école française pour y préparer le certificat d’études.
Un article de Georges Hardy (qui de 1934 à 1937 est recteur de l’Académie d’Alger, c’est-à-dire de l’Algérie) pose le problème de la scolarisation (Publication du Comité France Afrique, 12p., 1937). 100000 enfants [indigènes] sont scolarisés, 8 à 900 000 ne le sont pas, les créations scolaires correspondent à peine au croît démographique. L’urgence est de scolariser dans l’ensemble des villes, grandes et petites, les 65000 enfants de celles-ci, des deux sexes, grâce à 1300 classes de 50 élèves à créer. Ce parti pris exclut de scolariser dans les campagnes pendant dix ans, inclut une vraie scolarisation des filles des villes (pas leur faire « faire du tapis »). Pour garder le genre de vie traditionnel, Hardy préconise en milieu rural, où la scolarisation « moderne » ne peut créer que des « déracinés », 2 ou 3 ans d’enseignement mutuel, soutenu par des « praticiens » de l’artisanat ou de l’enseignement ménager, et non des instituteurs, ce système étant géré par les communes mixtes en liaison avec la politique de formation du paysannat mis en place avec les implantations des agences de l’Office du blé. Il s’agirait d’une « éducation de masse, dans le sens d’une amélioration des genres de vie [traditionnels]… il ne restera que le problème des régions les plus ingrates [nomades]… Si besoin, plus tard, le centre d’artisanat sera le fourrier de l’école à venir ».
Globalement les indigènes en écoles européennes forment 10% de l’effectif de celles-ci en 1927 (soit 24% des indigènes scolarisés au primaire) et en 1937, 17% de l’effectif (soit 27%). En 1931 le coût d’un élève en école indigène est 1/3 de celui d’un élève en école européenne.
Le taux de scolarisation primaire des indigènes est 5% en 1930, 8%= 1940, 16%= 1954. En milieu rural, les créations d’école ont un effet limité en raison de la dispersion de la population (sauf en Kabylie, en oasis sahariennes).
1940 : [sans doute sur initiative du recteur Georges Hardy, revenu à Alger] en septembre 1941 sont créés des Centres ruraux d’éducation, face aux 900 000 élèves indigènes non scolarisés, ce qui reprend les « classes auxiliaires » de 1908. L’idée est de tendre en milieu urbain vers l’école communale « normale », alors que les Centres ruraux sont « sur des nattes et dans un hangar, une scolarité rudimentaire en trois ans par des moniteurs, sous le contrôle du directeur d’école le plus proche jouant le rôle d’inspecteur primaire ; ceux-ci sont réticents. Si on avait créé 300 classes par an cela eut résorbé la brèche scolaire en 40 ans pour les 600 000 filles et garçons « en attente ». Or le nombre de classes créé fut de 40 par an, puis il a stagné en raison de la mobilisation de 1943-44. En 1942 le certificat d’étude « spécial indigène » est supprimé, car le niveau d’ « européanité » des jeunes urbains a cessé d’être un problème. Dans ces villes, « dans vingt ans on pourra établir l’obligation scolaire ». Par contre dans les douars du « français langue étrangère » reste nécessaire pour longtemps, avec de l’apprentissage agricole.
En dehors de cet effort de scolarisation des « indigènes » au niveau primaire, le système colonial (qui par ailleurs a scolarisé en totalité à ce niveau les « européens », mais aussi les juifs « indigènes » devenus citoyens français depuis 1870) développe peu à peu au niveau secondaire un enseignement du même type qu’en métropole, où les « indigènes » n’ont accès qu’en faible minorité, sans imaginer aucune filière de formation particulière : dans ces condition l’accès de ces derniers à l’université reste encore plus infime.
L’Université d’Alger, image de la province française ou centre colonial majeur (avant 1942) ?
De tout le système colonial français, c’est la seule université « à la française », complètement constituée. En corollaire, ce fut dans les années 1962-82 un phare de la coopération franco-algérienne, mais aussi un outil de la légitimité tiers-mondiste de l’Algérie, grâce aux intellectuels brillants qu’elle accueille, comme à l’époque coloniale.
Les débuts sont tout aussi modestes que dans les villes de province françaises. Il est intéressant de souligner quelles initiatives, quelles particularités se démarquent de cette province française.
Une école de médecine est créée dès 1857, incluant au départ la pharmacie : la santé de l’armée, puis des civils, est un besoin de base spécifique. Les écoles de droit, lettre et sciences datent de 1879, pour former « localement » des cadres jusqu’alors « naturellement » importés de métropole. En 1880, on recense au total 30 étudiants.
En 1909 ces écoles, devenues facultés, sont coordonnées en une Université. Le monopole de celle-ci s’impose par exemple à propos des deux chaires d’arabe existant antérieurement à Oran et Constantine : on les rattache à l’école des lettres d’Alger. Celle d’Oran, en 1926, doit être transférée à Tlemcen. Une licence es-lettres série langues et littératures vivantes, mention arabe, est créée en 1909 ; la même année, on recense 1600 étudiants au total. René Basset (arabisant) est doyen de la faculté de lettres, où Gsell est professeur d’antiquités de l’Afrique. En 1932-34, on remanie les diplômes d’arabe et de berbère, ainsi que de droit musulman. En 1942 on réorganise le certificat de droit algérien, tunisien et marocain, celui de droit musulman et celui de coutumes indigènes, avec comme matière complémentaire le droit comparé des coutumes et législations de l’islam.
Pour l’étude des milieux locaux, en 1926 on envisage une chaire de géographie du Sahara couplée avec la géographie générale. En 1929 se lance un projet de cours d’hydro-géologie. En 1937 est créé un Institut de recherches sahariennnes, qui « couvre » l’ensemble des possessions françaises, au Maghreb comme en Afrique noire, et qui profite après 1944 de l’occupation militaire française au Fezzan (libyen) pour étendre son domaine d’études. En 1942 on demande la création d’un Institut d’urbanisme.
L’Université d’Alger, vers 1920 a pour professeurs prestigieux Jérôme Carcopino (histoire ancienne), E. F. Gautier (géographie), Henri Basset (arabisant, en départ prochain au Maroc), Yver Peltier et Morand (droit), Mohamed ben Cheneb (linguiste). On modifie la chaire de philosophie musulmane, on règlemente le diplôme et le brevet d’arabe. En 1925, lors de la création d’un bureau d’ethnologie à l’Université de Paris, avec participation de l’Université d’Alger, on y propose Gsell comme directeur. En 1931, enseignent à Alger Pierre Martino (littérature française), Louis Gernet (histoire ancienne). L’ambiance intellectuelle de ces années permet qu’on joue du théâtre en arabe à Alger en 1937.
Le public musulman est fort restreint dans cette université : 61 étudiants en 1916, 147 en 1940, 360 en 1946 (dont une part non précisée de tunisiens et de marocains). Ce sont les professeurs de l’Université d’Alger qui sont examinateurs au bac à Tunis comme à Rabat, mais ils échouent à exercer leur tutelle sur les embryons d’enseignement supérieur qui naissent dans les deux protectorats, où cette tutelle est à Bordeaux pour Rabat, à Paris pour Tunis.
Modernisation précoce en Tunisie
La Régence de Tunis a commencé sa modernisation très tôt : sans doute parce que le pouvoir beylical s’était enraciné dans les bourgeoisies urbaines de Tunis et du Sahel, ouvertes sur la Méditerranée.
Vers 1860 à Tunis on essaie à la Medersa Acfariya un enseignement de sciences et math. C’est le lieu de la première école libre d’où sort le promoteur de la Khaduniya, société savante créée en 1896 : son modernisme est marqué par le fait que ce sont les adhérents qui élisent le président. En 1875 est créé le Collège Sadiki : 150 élèves au départ dont 30 internes, math, sciences, Coran, du français, de l’arabe mais aussi au début de l’italien et du turc. La qualité de l’arabe enseigné conforte la supériorité des sadikiens sur les tolbas éduqués à la Zitouna. Des professeurs français de qualité enseigneront à Sadiki jusqu’aux années 1970. Vers 1875, Sadiki assure la formation des fils de notables qui occupent les places de l’administration « moyenne » grâce à leur diplôme, au moment où la
modernisation économique enlève à ces familles les leviers sociaux que représentait le commerce traditionnel. Dès 1890, le protectorat confirme le rôle des sadikiens, éduqués en français et en science moderne. Même si ces sadikiens se voient fermer en 1900 l’accès au Lycée Carnot. On peut voir là l’origine de la classe moyenne moderne qui fait une spécificité de la Tunisie par rapport à un Maroc qui se modernise deux générations plus tard et à une Algérie où l’essentiel de la classe moyenne moderne est « pied-noire », non musulmane, avant 1962.
A la veille du protectorat français (1880), on trouve en Tunisie 23 écoles francophones (primaires), dont 20 catholiques et 3 de l’Alliance israélite. J. Berque décrit la carrière d’un instituteur du bled : Lods exerce de 1886 à 1923 à Ksar Essaf, Sahel tunisien. Il se fait enterrer sur place en bord de mer à Sellacta : il a été le maître « d’un fonctionnaire socialiste et d’un employé beylical ».
En 1900 nait l’école de filles Renée Millet, longtemps dirigée par Mme Eigenschenk, qui accueille en 1929 550 élèves de la bourgeoisie tunisoise.
Jacques Berque encore : L’entre deux guerres est le moment où se forment les parlers et sabirs entre les deux pôles que sont l’arabe du Coran et le français livresque : Gabriel Audisio fait connaître Musette. Radio Tunis a pour comique M. Martin qui sait imiter les accents [en français] du juif, du musulman « converti », du bônois. La langue française pénètre en Tunisie par les militaires, par les ouvriers travaillant en France. On envisage en 1931 (sans « plan » précis) une alphabétisation (francophone) en deux générations des tunisiens. Vers 1935, des polémiques autour de l’enseignement professionnel à Sadiki, dans Voix du Tunisien, où participent Jean Despois et Georges Hardy, tous deux géographes. En 1936 la presse française augmente ses importations à Tunis (le Canard enchaîné décuple ses ventes en un an). En 1934 Charles Saumagne, français de vieille souche tunisoise et connaisseur de la medina est nommé à la section d’Etat du gouvernement beylical.
En 1931, l’effort de scolarisation primaire moderne mené depuis 1918 aboutit à incorporer 6% des classes d’âge concernées chez les musulmans. Les recrutements d’élèves sont stimulés car les titulaires du Certificat d’études primaires sont dispensés de service militaire. Parallèlement se développe un enseignement primaire coranique modernisé et un enseignement privé (à Sfax ce sont les grands commerçants qui le financent).
Scolarisation primaire publique en 1931 en Tunisie
Public : | Enseignement normal | Enseignement franco-arabe | total |
musulman | 10 000 | 20 000 | 30 000 |
« colons » | 20 000 | 20 000 | |
total | 30 000 | 20 000 | 50 000 |
L’enseignement secondaire est fortement concentré à Tunis, où le Collège Sadiki passe de 75 élèves en 1914 à 400 en 1939. Il ne prépare au bac que depuis 1929 : avant ses élèves devaient pour accéder à cet examen faire une dernière année scolaire (payante) au Lycée Carnot, pilier de l’enseignement français, épaulé cependant peu à peu par des collèges secondaires (Bizerte 1920, Sousse 1926, Sfax 1934), où les familles font pression pour que leurs enfants puissent présenter le bac. En ces années les classes moyennes basses tunisiennes, après les notables, commencent à accéder à cet enseignement secondaire, grâce à de nombreuses bourses.
La statistique détaillée des quelque 6500 élèves du secondaire en Tunisie en 1945 nous donne une vue exceptionnellement précise des enjeux linguistiques dans cet enseignement.
Langues vivantes pratiquées par les élèves selon la communauté d’appartenance :
Communauté : | française | musulmane | juive | étrangères | total |
Ar. dialectal | 850 | 3 | 97 | 22 | 975 |
Ar. classique | 263 | 1092 | 33 | 13 | 1399 |
anglais | 2989 | 108 | 618 | 188 | 3905 |
allemand | 177 | 7 | 7 | 5 | 169 |
italien | 997 | 28 | 28 | 69 | 1380 |
En 1937 on délivre en Tunisie 94 bacs [toute origines des candidats confondus], dont 70 à des musulmans, dont un tiers sortent de Sadiki. La même année 50 musulmans sont reçus au bac en Algérie. Vers 1939 quelque 1000 musulmans sont scolarisés dans le secondaire.
En 1942, 550 000 enfants sont d’âge scolaire en Tunisie et les classes d’âge concernées s’accroissent plus vite que l’incorporation de nouveaux élèves à la scolarité. Les scolarisés sont 103 000 : 70% sont des garçons, 82% sont dans l’enseignement public ; 53% de musulmans, 12% de juifs, 27% de français et le reste d’étrangers.
L’enseignement supérieur en Tunisie, traditionnellement exercé par la grande mosquée de Tunis, la Zitouna, s’est réformé dès 1842 sur le modèle de l’Egypte. Le nombre de ses étudiants s’accroit : 1000 en 1913, 2600 en 1941, 12000 en 1950. Parallèlement son public provient de couches sociales moins élevées et plus provinciales. Les tolbas qui en sortent, dès 1933, sont protestataires : leurs débouchés dans l’enseignement comme dans la justice sont de plus en plus médiocres et vers 1950 ils revendiquent une arabisation dans ces deux secteurs.
Parallèlement, la Khaduniya est un institut supérieur développé par et pour les sadikiens : pour un public qui vers 1906 atteint 150 personnes, mais sans diplôme reconnu, on y enseigne du droit, du français, de l’histoire, de la géographie, des sciences et de l’hygiène. C’est en 1922 qu’un enseignement formel de droit tunisien y est organisé sur deux ans, avec un public surtout issu de la Zitouna, puis en 1930 s’y organise une filiale de l’Institut de droit « moderne », né en 1922 (il a en 1929 140 élèves, dont 4 musulmans).
Dès 1898 est créée à Tunis une école d’agriculture, qui ne recrute guère de musulmans avant 1924 (où parmi ces derniers on trouve des étrangers). En 1911 c’est une école supérieure de langue et littérature arabe qui nait, dirigée par Wiliam Marçais en 1927, avec à ce moment 240 élèves dont 110 musulmans. Cette école forme des interprètes en trois niveaux différents. Ainsi la Tunisie dispoe-t-elle, dès avant la seconde guerre mondiale, d’un tissu éducatif où des couches musulmanes croissantes côtoient les milieux juifs et chrétiens dans un enseignement où le français laisse une place importante à un arabe de qualité.
Prémices d’une modernisation tardive au Maroc, jusqu’en 1942
Si la colonisation en Tunisie a atteint, sans violences très durables, un pays déjà en voie de modernisation, le Maroc connaît une instabilité dans la décennie qui précède le protectorat (1912), puis dans les montagnes pour quinze ans encore, culminant dans la guerre du Rif où Français et Espagnols combattent dans les années 1920. Soumis à un double protectorat, le Maroc se prolonge au sud par des territoires sahariens encore « insoumis » dans les années 1930, si bien qu’une politique de modernisation décrétée d’abord dans les villes a débuté à peine dans les campagnes éloignées depuis une décennie quand survient le débarquement américain de 1942. Le maghzen marocain est avant tout un pouvoir à base religieuse puissante, fondamentalement traditionnel. Le protectorat français lance une politique de modernisation technocratique négociée avec le maghzen, dans un pays où tribus et villes traditionnelles, communautés musulmanes ou juives, réagissent très différemment à des politiques éducatives bien plus planifiées d’en haut que celles que nous avons rencontrées en Algérie ou en Tunisie.
Le rôle de l’Alliance israélite universelle (AIU, francophone) est manifeste dans l’amorce d’une scolarisation moderne au Maroc, y compris pour les filles, bien avant le protectorat. La première école est à Tanger en 1889, son directeur est chargé de mission en 1896 pour ouvrir d’autres écoles : il faut pour cela une demande de la communauté juive locale, on y envoie des « missionnaires » qui se sentent solidaires de celle-ci, mais différents : ils sont européens, civilisés (nombreux viennent de Smyrne…). Dès 1900 ces écoles viennent en concurrence de celles, laïques, de l’Alliance française. En 1910, l’AIU a 4000 élèves au Maroc et s’attache plus aux localités isolées où l’Alliance française pénètre peu. Rétrospectivement, on peut dire que l’AIU, qui a encore deux écoles vers 2000 à Casablanca et Meknes, avec 1000 élèves, a « modernisé » quelque 800 000 juifs marocains, dont 500 000 sont partis en Israël et le reste vers l’Europe, le Canada et les USA. Ce panorama que nous donne Elisabeth Antebi efface évidemment le rôle de l’école publique française, qui s’adresse aux milieux « modernes » des élites juives urbaines du Maroc.
En 1924, nous dit J. Berque, sort la première promotion d’éducation moderne issue du Collège Moulay Idriss de Fes, où enseigne Rémy Beaurieux ; protestation cette année-là des milieux fassis contre l’ouverture d’une première école de filles. Ces milieux refusent le schéma kémaliste de modernisation.
Le protectorat mène parallèlement une politique berbère de modernisation, sans passer par l’enseignement coranique ni la langue arabe, pour le primaire dès 1923, puis en 1927 pour le secondaire, où le collège d’Azrou a 200 élèves en 1935 avec pour débouché « supérieur » l’école Dar el Beida de Meknes, afin de contrer par des cadres fidèles la montée d’une jeunesse bourgeoise urbaine nationaliste et turbulente. Très élitiste, l’école militaire Dar el Beida, née en 1918, « St Cyr de l’Atlas », recrute en très petit nombre des sous-officiers issus de milieux modestes et des fils de grandes familles « maghzen » surtout rurales, pour une scolarité qui s’allonge progressivement (jusqu’à 4 ans en 1928, avec en outre un cours préparatoire pour les jeunes de 14 à 18 ans). On forme des lieutenants et des capitaines pour encadrer les troupes auxiliaires marocaines, mais aussi de futurs pachas et caïds de la haute administration, pour laquelle on se méfie des élites urbaines. Ce collège d’Azrou (en pays berbère), créé pour fournir une pépinière d’intellectuels désislamisés devient rapidement un foyer de militantisme nationaliste (Ch. A. Julien), mais aussi d’arabisation.
Dans ce Maroc où enseignent des professeurs de renom (Sallefranque, François Bonjean), en cette fin des années 1920 se sont formés dans ces quelques écoles les cadres du futur nationalisme marocain, alors adolescents. Mais parallèlement à cette modernisation, dans les montagnes, en ces mêmes années, persiste l’action de marabouts (agurram) qui meurent au nom de Dieu pour défendre leur terroir contre le Maghzen allié aux Français. Et en face d’eux se dresse l’officier français (hakem) « dans son bordj essayant d’opposer un môle de pureté au régime colonial » (J. Berque).
C’est vers 1931(nous dit Jacques Berque) que la Karaouine de Fès cesse de produire des érudits, mais continue de vivre comme lieu d’émotion et de protestation. Dans une Fès où négoce et artisanat sont en décadence, la Karaouine a 900 étudiants (1935), dont 750 venus du bled qui étudient encore le droit, alors que les 150 fassis se consacrant à une littérature enseignée telle qu’elle a été créée à El Azhar au Caire vers 1885 et codifiée plus formellement vers 1930. C’est le moment où à la Karaouine disparaissent les vieux lettrés, où l’on organise les études en trois cycles (total 12 ans) avec programmes, matières, livres scolaires, professeurs salariés. Le droit reste matière obligatoire. Déjà transformée dans ses structures, la Karaouine ne modernise ses enseignements qu’en 1941. Elle essaime des enseignements à Marrakech, Meknes et Tanger, mais le recrutement des élèves provient de plus en plus de milieux ruraux pauvres et très vite les tolbas qui en sont issus demandent une arabisation des administrations.
La doctrine de formation des élites modernes formulée par Lyautey et Georges Hardy est très directive : mieux vaut envoyer des étudiants en France que de créer au Maroc des noyaux contestataires. Par contre on a besoin de développer une connaissance moderne du pays : une mission scientifique est crée dès 1904, une école supérieure d’arabe et de berbère née en 1912 forme des interprètes, un Institut des Hautes Etudes marocaines nait en 1920, suivi d’un enseignement du droit à Casablanca et Rabat en 1925, puis des lettres en 1927. Ces quelques enseignements supérieurs ne débouchent que sur des emplois subalternes et les grandes familles envoient leurs fils pour des études longues en France, en Palestine ou au Caire.
Le Bulletin de l’enseignement public du Maroc, 1925, n° 63 (Larose, Paris) édite un ouvrage collectif sous la direction de Georges Hardy (alors directeur de l’instruction publique) et de Louis Brunot (inspecteur de l’enseignement indigène) : 18 collaborations européennes et 7 marocaines. « Il faut éclairer les maîtres qui nous arrivent de France sur les caractères [des indigènes]… leur communiquer le sentiment d’une différence… esprit de sympathie profonde… désir d’amélioration… comme un médecin examine un malade ». Aspect physique des indigènes : « le nez est le plus souvent droit et bien fait, le nez busqué n’apparaît guère que chez certains juifs islamisés ». Qualités sensorielles : « les épices et parfums font une faible sensibilité du goût et de l’odorat, bonne ouïe (meilleure que dans les campagnes françaises) et vue excélente chez les berbères ruraux. » Rôle essentiel de la mémoire, surtout auditive, liée à l’école coranique, comportements très utilitaires, usage très stéréotypé de la langue française en raison d’un apprentissage purement scolaire. Une société autoritaire où la franchise n’est pas possible. Une éducation sexuelle [des jeunes garçons] non lubrique, beaucoup plus poussée que chez les français (grâce à la fréquentation du hammam avec les femmes). Le livre nous propose aussi une ethnographie de la naissance et de la petite enfance (le vêtement est de parade, non de protection) et une ethnographie de toute la vie quotidienne.
Un article de Lucien Paye, chef du service d’enseignement secondaire, primaire et professionnel musulman au Maroc, brosse un tableau d’ensemble des problèmes (Education de la jeunesse marocaine, réflexions et principes d’action, 1940, Rabat, l’Ecole du livre). Il recense ce qu’est l’éducation de l’élite, deux collèges à Rabat et à Fes, où dès les années 1930 on a introduit de l’anglais et du latin pour que les élèves puissent passer le bac français, moment où parallèlement des élèves musulmans sont admis dans les lycées français du Maroc. Il évoque le problème de l’enseignement de l’arabe, médiocre, pour lequel il faut s’inspirer des progrès réalisés en Egypte. Il propose au niveau primaire un enseignement rural de base, avec des éléments d’agriculture ou d’artisanat, donné par des moniteurs, et en milieu urbain un enseignement plus poussé, accueillant aussi les meilleurs éléments ruraux sélectionnés, aboutissant à un certificat d’études primaires « de cadres ». On manque particulièrement d’instituteurs et de moniteurs d’origine rurale. On peut s’inspirer des écoles élémentaires organisées pour les fils de goumiers près des goums (les goums sont des troupes indigènes « de métier » encadrées par des Français, assurant l’ordre au nom du Royaume chérifien dans les régions récemment pacifiées). Ces deux textes montrent à quel point le Maroc est un pays profondément exotique pour ces deux hauts fonctionnaires de l’éducation que sont Georges Hardy et Lucien Paye.
C’est d’en haut, dans une ambiance technocratique, que naît la modernisation éducative. Pour le primaire, 3000 Marocains sont scolarisé en école moderne en 1919, 24000 en 1939, soit 1% des classes d’âge concernées. Pour le secondaire, des collèges « modernes » sont créés en 1930 à Fez, Rabat et Azrou, un en 1937 à Marrakech, un autre à Tetouan. Les effectifs scolarisés sont de 1350 en 1938, dont 360 dans les établissements destinés aux Européens. Les élèves appartiennent essentiellement à des familles maghzen, fils de fonctionnaires traditionnels, et non aux milieux commerçants. Les milieux aisés freinent cette scolarisation (dont on craint qu’elle débouche sur la conscription), freinée aussi par les docteurs de la Karaouine, la grande mosquée de Fez gardienne de l’islam chérifien. Paralllement un enseignement musulman modernisé privé scolarise 4000 élèves en 1939 à Fes et Rabat. Dès les années 1930 se crée une association d’anciens élèves de l’enseignement moderne, groupe de pression qui demande plus d’heures d’arabe, le droit de passer le bac, la création d’enseignement pour les filles. Des familles aisées de Fes, Salé, Rabat, envoient leurs fils étudier dans le secondaire à Paris ou au Caire.
Le présent texte Education et culture au Maghreb, entre français et arabe, Monde précolonial et monde colonial : quelle modernisation ? (avant 1942) est suivi de deux autres :
Virage de la décolonisation : nouvelles mutations dans l’éducation au Maghreb (1942- 1955/ 62) http://alger-mexico-tunis.fr/?p=978
Indépendances et politiques éducatives au Maghreb http://alger-mexico-tunis.fr/?p=981
Sources
Chez les historiens, sociologues et autres qui ont écrit des ouvrages, souvent militants, sur le Maghreb de leur époque, les chapitres sur l’éducation sont toujours présents et m’ont été utiles. De même les revues « généralistes » ont abordé ce thème. Nous suivons un seul ordre chronologique pour tous les textes utilisés.
Truphémus Albert, Ferhat, instituteur indigène, Alger, Soubiron, 1935. Republié dans Algérie, un rêve de fraternité, Paris, Omnibus, 1997, textes commentés et sélectionnés par Pierre Dugas, p. 155- 297. Roman fondateur écrit vers 1926 au plus tard. L’auteur, inspecteur primaire pour 20 ans en Algérie depuis 1908, décrit la Petite Kabylie, dans l’arrière pays de Collo. Deux thèmes essentiels pour ces années de part et d’autre de la guerre de 1914-18 : la vie quotidienne autour d’une famille d’instituteurs en milieu rural indigène, venus de France au début du siècle et, sous la plume de leur élève indigène devenu instituteur à son tour, le récit de l’ « acculturation » de ce dernier, incorporé à la culture scolaire française et de ce fait dramatiquement coupé de son milieu familial, sans avoir accès réellement au milieu moderne qui a assuré sa « promotion ». Truphémus, rédacteur en chef de l’hebdomadaire de la SFIO (parti socialiste) en Algérie, Demain, à partir de 1926, ne publie qu’après sa retraite, cette année là, peu à peu ses romans qui apparaissent comme des pamphlets anticolonialistes, dont le dernier est Ferhat.
Documents algériens ( http://alger-mexico-tunis.fr/?p=113)
4 documents sur l’éducation, 1946, 1947 (2) L’historique que nous suivons est donné sans doute par M Chaffaud, vice recteur de l’académie d’Alger pour trois « Documents algériens » de décembre 1947, 1956
Temps modernes 1956, n° 123 mars-avril
Robert Davezies, Le front, 1959, Editions de minuit [l’auteur est prêtre à Paris, il fréquente durant plusieurs mois en 1958-59 les camps d’Algériens « réfugiés » en Tunisie et en tire une vision militante et unanimiste de la révolution algérienne. Il aborde la question culturelle de celle-ci et de l’après guerre jugé imminent, en particulier p 209 sq.].
Jacques Berque, Le Maghreb entre deux guerres, Seuil, 1962, fait suite à Les Arabes d’hier à demain (1960), Seuil. Série de monographies très habilement menées, avec des présentations inédites d’élèves en sociologie, d’instituteurs, de fonctionnaires français, de romans, d’analyses de la presse d’époque, [reprend un article signé F. Jabre de Annales ESC 1937].
Yvonne Turin, Affrontements culturels dans l’Algérie coloniale, école, médecine, religion, 1830-1880, Maspero, Textes à l’appui, 1971 [tiré d’une thèse et dédié à Fernand Braudel]. Décrit le « progrès » chaotique par rapport à une France où celui-ci est encore un enjeu non gagné et où les « élites » algériennes ne sont pour l’essentiel pas concenées.
Charles André Julien. L’Afrique du Nord en marche, Juliard, 1972, 353 p. + annexes, bibliographie et index. Ecrit d’une traite aout octobre 1952, publié novembre 1952, diffusé alors presque sous le manteau en AFN. Juste un mot sur les propositions de CAJ en été 1952 : un secrétariat d’état aux affaires nord-africaines auprès du 1er ministre capable de contrer Quai d’Orsay et Place Beauvau, une vraie organisation de l’Union Française : il le souhaite et n’y croit pas, en prônant pour l’immédiat des négociations d’autonomie interne, puis d’association réelle, pour Tunis et Rabat, et pour Alger des élections non truquées et un collège unique.
« Algérie 20 ans, que savons nous vraiment de cette terre, de ses révolutions aujourd’hui ? » Autrement, n°38 mars 1982, 280 p., Georges Chatillon éditeur.
Guy Pervillé, Les étudiants algériens dans l’université française, 1880-1962, Paris, CNRS, 1984, 346 p.
Jack Goody, Entre l’oralité et l’écriture, Paris, PUF- Ethnologies, 1994, 323 p. Pose le double problème : l’existence d’usages de l’écrit dans la longue durée dans des sociétés où cet usge se restreint à une petite élite religieuse et administrative ; l’introduction généralisée de l’écrit dans des sociétés prises dans une modernisation rapide « exogène » (dans l’Afrique noire coloniale).
Esprit 1995-1 « Avec l’Algérie ».
Elisabeth Antebi, Les missionnaires juifs de la France, 1860- 1939, Calman Lévy, 1999 (histoire des écoles de l’Alliance Israélite Universelle)
Pierre Vermeren, La formation des élites marocaines et tunisiennes, des nationalistes aux islamistes, 1920- 2000, 2002, La découverte, 513 p. [thèse 2000, autre édition Alizés, Rabat, 2002]. Seul travail synthétique d’historien, sur le long terme (remonte au XIXe siècle pour la Tunisie), comparant les deux pays mais aussi parfois aussi l’Algérie. Le point de vue est politique : création d’élites modernes en insistant sur les institutions d’enseignement, sur les stratégies des familles, sur les initiatives de politiques publiques. Les problèmes des langues d’enseignement, du rôle des colonisateurs puis des coopérations, sont présents en sous main.
Dalila Arezki, L’enseignement en Algérie, l’envers du décor, Séguier/ Atlantica, 2004, 324 p. [thèse de psychologie], mélange des données vécues (pas toujours nouvelles) à des développements assez convenus de théorie psychologique de l’apprentissage scolaire.
Kateb, Kamel, Ecole, population et société en Algérie, l’Harmattan, histoires et perspectives méditerranéennes, 2005 ( ? copyright ?), 2008, 130 p. (pas mal de comparaisons au Maghreb et au Machrek chez ce sociologue- démographe)
Histoire de l’éducation [Ecole Normale supérieure de Lyon], n° 122 avr- juin 2009, Pierre Singaravelou « L’enseignement supérieur colonial, un état des lieux », p. 71-92.
Histoire de l’éducation [Ecole Normale supérieure de Lyon], n° 128 oct-déc 2010, spécial Enseignement dans l’Empire colonial français (XIXe-Xxe siècles) « La politique française pour l’adaptation de l’enseignement en Afrique après les indépendances (1958-64) », p. 163- 190.
Sur le chemin de l’école, documentaire de Pascal Plisson (2012) prend en reportage, sans misérabilisme, divers enfants des « tiers-mondes » d’Asie, d’Amérique ou surtout d’Afrique (dont un groupe de filles du Haut Atlas marocain) : éloignement des villages et internat pour la scolarisation des jeunes marocaines…
Sites web :
Ils sont nombreux surtout sur l’enseignement primaire dans l’Algérie coloniale : il est clair que de nombreux enseignants retraités en France ont des matériaux précieux et abondants et ont voulu témoigner.
http://www.unice.fr/ILF-CNRS/ofcaf/11/Pays/algerie.html (sur la francophonie en Algérie)
http://telemly.pagesperso-orange.fr/ens/index.html (sur la scolarisation coloniale en Algérie
http://193.48.221.4/amp/page/genese.do (sur la scolarisation coloniale en Algérie)
Archives :
Tunisie, Maroc : Affaires Etrangères, les dossiers consultés concernent essentiellement la période 1940- 1955. Ils sont particulièrements riches pour le Maroc et permettent de repérer l’amorce (essentielement vers 1945-47) d’une politique cohérente concernant l’ensemble nord-africain.
Algérie : Archives d’Outre-Mer, Aix en Provence, que j’ai à peine effleurées (une chronique de l’Université d’Alger depuis ses commencements).
Acteurs :
Les textes de Georges Hardy (1884-1972) et de Lucien Paye (1907-1972), l’un et l’autre hauts fonctionnaires en charge de l’enseignement, deux visions politiques et deux générations
[1] C’est en participant aux activités de l’association Coup de soleil que j’ai pris conscience de l’immensité des littératures francophones d’écriture maghrébine et que m’est venu le désir d’y voir clair. Dès le début des années 2000, j’avais commencé à lire et à prendre des notes sur ce sujet, mais aussi à en discuter avec mes amis ex-coopérants ou ex-pieds rouges. Ma participation en 2007 à un voyage au Souf avec des anciens instituteurs de l’Amicale des Soufis a accru encore cet intéret. J’ai passé aussi quelques journées aux archives des Affaires étrangères à Paris ou à celles de l’Outre Mer à Aix en Provence. Il fallait un jour passer de l’accumulation des notes à une rédaction approximative de tout ceci, même si la documentation disponible, immense, n’a pas de fin.
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