Berbères juifs Julien Cohen Lacassagne, La fabrique éditions, 2020, 199 pages
« Les Maghrébins juifs ont marqué durablement les sociétés nord-africaines et contribué à une authentique civilisation judéo-musulmane partageant une langue, une culture et un même substrat religieux. La colonisation a bouleversé cet héritage, que Cohen-Lacassagne restitue brillamment contre « la tentation d’écrire une histoire juive isolée de celle du reste du monde ».
Tant en France qu’en Israël cette vision ouverte de l’histoire juive est importante, elle permet de lutter contre les interprétations « exceptionnalistes » du judaïsme qui nient une histoire commune trimillénaire de populations qui ont adopté des monothéismes, dont judaïsme christianismes et islam sont des formes qu’aucune rigidité ne séparait pendant de longues périodes. « En considérant le judaïsme comme un système de rites et de croyances, et non une donnée ethnique ou tribale [on peut] se représenter les colons phéniciens comme étant eux-mêmes les propagateurs de rituels et de dogmes judaïsants » (p.74). Le monothéisme rigide de chacune des trois religions « du livre » a connu bien des accommodements : « On peut aisément interpréter le principe de la trinité, tout comme le culte marial ou celui des saints, comme un compromis entre le monothéisme et le polythéisme, facilitant son assimilation et sa diffusion. Par comparaison, les exigences et la radicalité du monothéisme juif constituèrent certainement un frein à son expansion » (p 111). Si au sein de l’Empire turc comme au Maroc une part des juifs « sépharades » parlait espagnol, bien plus nombreux étaient ceux de langue arabe, mais avec une forte minorité en Algérie et plus encore au Maroc, qui parlaient des langues berbères, en particulier en régions montagneuses rurales. Marginaux de l’islam (ibadites) et juifs ont coexisté dans des zones difficiles, les uns parlant arabe, les autres berbère, à Djerba (Tunisie), au Mzab (Algérie), au Djebel Nefusa (Libye) (p. 147).
Certes ce souvenir s’efface chez leurs descendants, aussi bien en Israël, où les Marocains sont souvent en bas de l’échelle sociale, qu’en pays francophones (France, Belgique, Québec, etc). Mais des fonds d’archives gardent trace des contrats où se côtoyaient les trois langues, arabe, berbère et hébreux, usant des deux alphabets arabe et hébreux… Nous avions déjà rencontré ce problème de la « judéïté » , maghrébine entre autres http://alger-mexico-tunis.fr/?p=1551
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